Exprimer ce que je ressens. Le contexte. Est-ce que ce sera suffisant ? Elle est butée comme un bélier dans la porte de l'étable... Je me prépare avant la rencontre. Mets sur papier mon analyse de la situation. Et je demande au ciel de me « donner les bons mots, le bon ton, la bonne façon pour que tout s'arrange au mieux et qu'on puisse tirer le meilleur de nous-mêmes ». Pour qu'on en ressorte
« gagnante-gagnante » comme y disent...
Cette forme de communication est de la « haute voltige ». Je dois prendre en compte les mots, les expressions, saisir dans toute sa sensibilité le poids de mes propres paroles et leur impact sur l'autre. Je dois me retenir de sauter lorsque je juge que le jugement de l'autre est erroné, voire carrément dans le champs... ou, tout à coup, si je reçois une vérité déplaisante que je ne m'attends pas. Parce que ça arrive aussi.
Devant un bon café fumant, dans un tout autre contexte, elle commence. Nous sommes d'accord que la démarche est importante pour nous deux, nos patrons et nos équipes respectives. C'est bien, je découvre sa perception. Je continue. J'ai fais un shéma et lui présente. Des bulles. La mienne, la sienne, chacune notre intelligence. Ce que nous avons en commun, une bulle de l'entreprise privée, de la facilité, la simplicité et la rapidité d'action. Elle appuie de la tête, appréciant ce constat d'efficacité. Tu penses, tu agis, tu produis. ce qui diffère de notre situation professionnelle actuelle. D'ailleurs, le point principal est qu'elle croit toujours, importé du privé, que le style autoritaire est permis. Que le « client » a toujours raison et peut demander ce qu'il veut, de la façon qu'il veut. C'est à cette croyance profonde que je m'attaque. Le ton monte. En me coupant, je lui fais remarquer son manque d'écoute. Mais ça m'arrive aussi, je l'admets. Une petite voix intérieure me dit « attention, ça shire... » ou la pente est glissante... Je continue sur nos différences : nos processus d'approbation, nos tâches méconnues, les hiérarchies à respecter, la culture organisationnelle. Et surtout, surtout, le changement de culture organisationnelle depuis la mise en place de mesures pour contrer le harcèlement et la violence en milieu de travail. Le gestionnaire est dorénavant responsable du bon climat de travail. Le style autoritaire n'est plus de mise. Tout simplement parce qu'il occasionne des burn out et un fort taux de roulement du personnel. C'est contre-productif.
On passe en revue les derniers courriels. On s'explique les pourquoi et les comment... Elle me dit, à son tour, que je me montre intransigeante et plus difficile que je ne le pensais dans mes relations avec elle et... ses collègues. Je tombe des nues. Je me savais ferme pour mener les projets d'édition à bon port. J'ai dû imposer la politique linguistique et la féminisation des textes. Pas drôle quand on est habitué à écrire d'une certaine façon. Je suis aussi la porte d'entrée de ma direction pour ces « clients » et suis bien souvent entre « l'arbre et l'écorce (ou l'arbre et l'Écosse... comme dit une charmante parenté). Mais je croyais que nos success stories rendaient les professionnels heureux... et bien pas évident.
Voilà. On se connaît un peu mieux maintenant. Nos contextes de travail aussi. On s'est dit plein de choses. Sans méchanceté mais sans complaisance non plus. L'agressivité est tombée. Comme un gros nuage noir au travers duquel on est passé. On a le goût du beau, du bon. Ça se sent.
On passe en mode solution.
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