A la fin de la journée, nous terminons la visite par l'une des plus belles plages du coin. Assise sur un banc de bois, j'entame la conversation avec deux dames des États-Unis. C'est l'une d'elles, en fait, qui me fait remarquer que les enfants rencontrés ne sont pas à l'école. Me revient le regard de l'enfant de la maison typique, gênée d'être là elle aussi. Bon, peut-être était-ce son jour d'accueillir les visiteurs ?
Mais j'avais surtout conscience de son éloignement de tout, surtout de toute distraction. J'imaginais alors un bus de lecture. Si seulement elle avait des livres à lire, chez soi. L'importance de la lecture pour s'évader de son univers très beau mais très limité.
Ma mère a lu toute sa vie. Je la revoie couchée sur son côté du lit, sa lumière de chevet allumée. Quelle que soit l'heure à laquelle sa journée finissait, elle prenait le temps de lire. Parfois très tard. Des romans, des biographies, des livres où se comprenait le monde, l'humanité. Pour changer aussi des nombreuses tâches du quotidien. J'y ai pris goût moi aussi. Il m'arrivait souvent de me coucher en travers du lit de mes parents et de lire, tournée vers la lumière de la fenêtre.
À son décès, toutes les bibliothèques de la maison étaient pleines à ras bord. Nous avons élagué l'une du sous-sol car il fallait changer le tapis. Des caisses de romans se sont retrouvées chez ma belle-sœur. Elle-même en a donné à sa parenté, mais aussi à une petite madame d'un certain âge, d'une île éloignée, qui n'avait pas les moyens de s'en acheter. Et j'ai eu un baume au cœur, de savoir qu'un peu de ma mère, de ses livres qu'elle signait de sa main à leur acquisition, achetés avec bonheur au Colisée du livre de Québec, dans les marchés aux puces, dans les librairies, ce qu'elle pouvait donner de mieux aux Îles, servait maintenant à nourrir l'esprit et les émotions, à s'évader de notre géographie très belle... mais limitée aussi.
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