Je sors du métro et me bute à des portes fermées dans ma tour à bureau à cause de manifestations à venir. La circulation est redirigée vers une seule porte. Tout le monde passe donc inévitablement devant cette femme recroquevillée sur un banc à l'extérieur. Elle est peu vêtue... et les pieds nus. Elle ne sollicite pas. Elle a visiblement des problèmes de santé mentale. Ce triste tableau n'est pas sans me rappeler mon vieux monsieur et son panier de Par un beau matin de novembre... le froid me glace un peu plus.
Au gardien de la porte, je dis : « Y a une femme là... ». On me répond : « Je sais, ça fait deux heures qu'elle est là. On a demandé la police. » Moi : « Au moins les services sociaux. Elle est nu pieds. »
Deux heures à geler ! Je descends, bouleversée, pour m'acheter mon double espresso, essentiel à ma survie intellectuelle. Dans un geste impulsif, j'ajoute «... et un grand café ! » En regardant le beau grand serveur qui sourit surpris... un beau grand noir qui ressemble au chanteur Corneille. Je verse un peu de lait, j'agrippe deux sucres.
Je remonte le courant de cette foule indifférente, emprunte la sortie. La dame est toujours là. Le froid aussi. Au moins elle a remis ses bas.
Je lui tend le café fumant « Prendrais-tu un bon café ? » (Je n'ai pas pensé au muffun... enfin). Mais, comme un alpiniste tombé au fond d’un gouffre et que l’on remonte à la surface… J’ai vu son regard revenir à la vie. Du café, du geste, de la chaleur humaine plus que celle de la boisson. La reconnaissance à l’état pur. « Que Dieu te bénisse » me dit-elle. Et venant de cette personne, je suis convaincue qu’Il a entendu…
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